C'était un jour corbeau
Un jour sans hirondelles
Il a quitté le nid
Il est parti sans elle
Elle l'a regardé faire
Comme si c'était écrit
Sa quarantaine sonne
Sans un enfant de lui
Ne laissant derrière lui
Que des ronds de poussières
Un disque de Chopin
Sur la grande étagère
Et des lettres d'amour
Qu'un jour elle relira
Quand ses cheveux blanchis
Viendront sonner le glas
Il offrait des miroirs
Comme on offre des fleurs
Elle faisait des bouquets
De ses reflets trompeurs
Il honorait son corps
Comme une cathédrale
Mais jusque dans leurs draps
S'invita la rivale
Elle a tissé sa toile
Dans le plus grand silence
Posa sur leur amour
Un parfum de distance
Elle a prit le dessus
Sans mettre de dessous
Cette maitresse insidieuse
Avait tous les atouts
Elle n'était ni plus jeune
Elle n'était ni plus belle
Elle ne portait ni robe
Ni guipure, ni dentelle
Elle s'appelait Souffrance
Elle s'appelait Passé
Elle s'appelait l'Irlande
Et puis la peur d'aimer
Dans l'appartement vide
L'écho de leur caresses
Son amour impuissant
Face à la forteresse
On ne pénètre pas
Sans y être invité
Dans la douleur de l'autre
Qui interdit d'aimer
C'était un jour corbeau
Un jour sans hirondelles
Il a quitté le nid
Il est parti sans elle
Son cœur est en travaux
Son cœur est entravé
Et son corps déserté
Devient corps étranger
C'était un jour corbeau
Un jour sans hirondelles
Il a quitté le nid
Il est parti sans elle